Du vert et du rose. Mais aussi du bleu. Comme face à un tableau, le paysage se veut bucolique. L’air frais vivifiant soulève les pétales de cerisiers en fleur. L’eau semble figée, apaisée par le calme du lieu. Même si une timide cascade apporte un léger son de clapotis. Les arbres majestueux et plusieurs fois centenaires cohabitent avec de petits ponts en pierre où les passants s’y baladent calmement. Quelques petites fermes, des nōka, viennent compléter le paysage, plus loin à des centaines de mètres de là. Dans ce jardin où tout n’est que douceur, on murmure que les esprits traditionnels occupent secrètement les lieux. Un endroit qu’ils ont choisi avec soin… un endroit zen !
Direction le pays du soleil levant avec un jeu qui sent bon la sérénité et l’apaisement. Une petite boîte ludique éditée chez Bankiiiz Éditions. Un éditeur qui a déjà su nous convaincre avec un premier jeu également japonisant: Mû ! On vous en a d’ailleurs parlé tout dernièrement.
Pour Yokai, c’est Julien Griffon qu’on retrouve aux commandes du titre et Christine Alcouffe aux illustrations. Une créative qui a déjà marqué de sa patte – désormais bien reconnaissable – des jeux comme Paper Tales ou plus dernièrement Shy Monsters. Dans Yokai, deux à quatre joueurs pourront donc coopérer dans des parties d’environ vingt minutes pour une accessibilité de l’opus dès huit ans. A noter que Yokai est une nouveauté à l’heure où nous écrivons ces lignes et que vous pouvez d’ores et déjà le retrouver dans toutes les bonnes boutiques.
Mais alors, de quoi sera-t’il question ? Les esprits japonais présents dans le jeu se sont emmêlés et nous devrons les apaiser. Eux qui sont d’habitude si zen ! Seize cartes sont mélangées, retournées face cachée et le but du jeu sera de regrouper les quatre familles d’esprits. Sauf que les joueurs ne pourront pas communiquer sur le jeu durant toute la partie. Des indices pourront être révélés et utilisés… mais c’est tout ! Avant de vous expliquer plus en détails les règles du jeu, on regarde immédiatement le contenu d’une boîte de Yokai, avec notre capsule vidéo accélérée.
Y’a Koi Dedans ?
La famille c’est important !
Le jeu comporte 16 cartes Yokai (esprits) qui sont mélangées et disposées face cachée sur l’air de jeu. Le but sera, dans un nombre de tours limités, de rassembler les esprits par famille.
Mais attention, dans Yokai, les joueurs n’ont pas le droit de communiquer sur les couleurs des cartes, ni sur leur position. Finalement, vous pouvez discuter de tout, sauf du jeu !
A votre tour, vous regardez secrètement deux cartes. Puis vous devez déplacer une carte avec une destination adjacente à une autre carte. Pour finir, vous avez le choix de révéler une des cartes indice ou de placer une carte indice sur un Yokai. Cette carte va immobiliser le Yokai pour le reste de la partie. Les indices vous donnent des indications – moyennement précises – sur l’identité du Yokai immobilisé.
La partie se termine lorsque la dernière carte indice a été utilisée. Mais les joueurs peuvent décider de manière commune de mettre prématurément fin à la partie s’ils estiment que tous les Yokai sont apaisés. In fine, toutes les cartes sont retournées face visible et si tous les esprits sont regroupés par famille, les joueurs gagnent. Sinon, c’est perdu !
Coopération apaisante
A l’intérieur d’une boîte de Yokai, on retrouve les fameuses 16 cartes d’esprits, 14 cartes indices, 6 cartes affinités, 3 cartes objectifs ainsi que la règle du jeu. Le matériel est de bonne facture avec de jolies cartes toilées au format carré. Visuellement, on a beaucoup aimé le style épuré et très frais des illustrations de Christine Alcouffe. Le rendu coloré et convivial nous a énormément plu et apporté un véritable plus au jeu.
Au niveau de la règle du jeu, il s’agit d’un livret de 12 pages mais d’un petit format. En à peine dix minutes, les règles sont lues et assimilées. Très bien rédigé, le feuillet a été ponctué de quelques illustrations bien choisies qui aident à la compréhension. C’est donc une accessibilité plutôt facile que nous offre Yokai. Et ça c’est vraiment super !
On a apprécié un thème plutôt original. Certes les jeux estampillés « pays du soleil levant » ont actuellement le vent en poupe. Mais là, on s’amuse avec les esprits, sur des visuels très sympathiques et l’ensemble sort de l’ordinaire. Surtout que ce n’était pas forcément gagné avec un gameplay qui reprend une mécanique de base qu’on a pas vraiment l’habitude de retrouver dans des jeux destinés à des adultes. Ou néanmoins, pas pour de jeunes enfants.
D’ailleurs, parlons du gameplay. Aussi étonnant que cela puisse paraître, c’est bien un memory qu’on retrouve au centre de la mécanique de Yokai. On soulève deux cartes, et on essaie d’en faire quelque chose avec. Mais vous vous doutez bien que cela ne s’arrête pas là. Et c’est justement ce qui nous a beaucoup plu et nous a même fortement impressionnés. Il fallait oser utiliser cette mécanique, la retravailler, la pousser plus loin, et en faire un jeu aussi stratégique que passionnant. On retrouve donc des mécanismes supplémentaires de placement, de gestion mais aussi de la coopération et une fois n’est pas coutume, de l’instinct ! Oui, de l’instinct. Pour lire le jeu et les intentions des autres joueurs; ce qui n’est pas toujours simple. Car les indices ne sont pas toujours précis et il faudra encore faire preuve de déduction.
Concernant le tour de jeu, autant vous dire que cela se passe très rapidement. Les étapes sont rapides et peu nombreuses. C’est donc des parties relativement vives et nerveuses qu’on retrouve avec Yokai. Même si les esprits souhaitent pourtant être apaisés. Mais qu’à cela ne tienne, on ne reste pas longtemps à attendre et c’est plutôt une très bonne chose. En revanche, cela n’empêche pas de devoir réfléchir correctement car chaque placement est important et mieux vaut prendre quelques secondes de plus pour se positionner avec efficacité et donner de bons indices aux autres joueurs.
Au niveau de la rejouabilité, voilà encore un point fort de cet opus. Même si pour chaque partie les cartes sont systématiquement mélangées, l’auteur a eu la bonne idée de rajouter des contraintes. Des contraintes, certes optionnelles, mais qui font varier la position exigée en fin de partie. Ou encore les affinités entre les esprits. Et au final, cela rajoute encore des éléments supplémentaires qui continuent efficacement au renouvellement des parties.
Partir d’une idée d’un memory et arriver à nous proposer un jeu stratégique et vraiment original… c’est quand même très fort ! Sur le coup on a été véritablement bluffés. Et de surcroît, la règle reste simple et abordable. Mais surtout, Yokai aura su nous charmer par cette jolie profondeur de jeu. De l’interaction, de la déduction et un titre léger qui se veut terriblement addictif. En outre, le petit format de Yokai en fait un compagnon idéal pour les vacances. Et un partenaire indispensable pour cette année ludique. On en demandait pas tant, mais puisque c’est bon, autant ne pas se priver. Surtout que le jeu est sublimé par les chouettes illustrations de Christine Alcouffe.
Un concentré de bonnes choses qui sent bon l’Asie et qui nous a fait voyager dans un univers ludique vraiment bien pensé. Certes la boîte est un petit format mais Yokai a vraiment tout d’un grand !
Maintenant, à vous de vous forger votre propre avis.
La règle du jeu en français
Yokai sur le site de Board Game Geek
Le site de l’éditeur Bankiiiiz Editions