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Quand le numérique s’invite sur nos tables de jeu

par jeudeclick
Publié : Dernière mise à jour le 437 vues 10 minutes de lecture

Que de bons moments passés au jeu de l’échelle, au jeu de l’oie ou même à ce bon vieux mille bornes. Et puis, pour varier un peu les plaisirs on s’est ruinés au Monopoly et à ses dizaines de versions différentes. Mais dimanche, retour à la tradition et au très sérieux jeu de cartes avec papy, mamie ou grand-papa et grand-maman. Ça c’était jadis et le monde du jeu de société a depuis, bien évolué.

Avec l’arrivée des jeux vidéos en 2D, fin des années 80, début des années 90, le numérique en a occupé plus d’un durant de nombreuses années. Certains se souviendront sans doute de ces heures de jeux passées devant un ordinateur ou une console de jeu, en LAN ou en solo devant son écran. Pendant ce temps, le jeu de société n’intéressait alors qu’une toute petite frange. Des marginaux ces gaillards ! Avec leurs cubes en bois, leurs règles imprimées sur papier A4 et leurs « machins pas beaux » qu’ils osent appeler des jeux !

Et bien des années plus tard, alors que les jeux vidéos semblaient être les seules occupations de certains, voilà que le jeu de société pointe à nouveau le bout de son nez. Et pire encore, il intéresse du monde. De plus en plus en plus de monde ! Finalement, après la quinzième version de Final Fantasy ou la v. 23.9.6.17beta-6 de Half-Life, il était temps de passer à autre chose.

Besoin de sortir sa tête de l’écran

(un exemple de jeu avec App mobile)

Ne tirons pas à boulets rouges sur les jeux vidéo. Bon nombre de titres sont très stratégiques et font appel à la réflexion. Que se soit par exemple en « point & click » et au travers de dizaines d’heures de jeu à développer sa civilisation, le cerveau travaille dur. Néanmoins, les joueurs restent souvent seuls devant leur écran. Seuls à réfléchir, seuls à s’amuser, seuls… seuls… seuls… Cette sur-présence informatique cumulée à la solitude liée aux jeux vidéo auront sans doute contribué au développement des jeux de société modernes. Ou en tout cas à un questionnement. Bien entendu, il ne s’agit que d’un exemple. Néanmoins, l’omniprésence du numérique et de l’informatique ont indéniablement permis au secteur ludique de prendre une nouvelle place en matière de divertissement.

L’humain aime l’humain. C’est physiologique, il apprécie de se retrouver en présence de ses congénères et n’est pas fait pour vivre seul. Ainsi, pour de nombreux joueurs, le jeu de société est un moyen tout trouvé de s’amuser, d’échanger et de rencontrer du monde. Surtout que les jeux modernes offrent un panel plutôt impressionnant. Jeux de cartes, de plateau, de rôle, de simulation ou party games (pour ne citer qu’eux). Et que dire des thèmes ! Il y en a pour tous les goûts. Sur le thème des animaux, de l’économie, de l’héroïque-fantasy, du sport, du vin, de l’agriculture, des western, de l’espace, de la géographie, de la télévision, de la guerre… Ouuuuf, et on pourrait encore continuer durant des heures !

Finalement, les jeux de société sont une véritable bouffée d’air pur dans un quotidien ultra-informatisé. Faire nos courses en ligne, s’écrire et discuter par écrans interposés, opérer des malades à l’aide de robots pilotés par informatique, diagnostiquer des pannes moteur via ordinateur, consulter la météo sur smartphone, se guider par GPS, apprendre à lire sur tablette… Nos vies occidentales sont devenues dépendantes du numérique. Pour énormément d’actions quotidiennes ! Alors jouer sur un plateau en carton, pousser des cubes en bois, utiliser des cartes et déplacer des figurines ! Même les règles du jeu sont imprimées sur du papier ! Vous vous rendez compte ? Du papier ! Le contraste en deviendrait presque irréel.

Mais que tout cela fait du bien ! De nombreux joueurs apprécient désormais, une ou plusieurs fois par semaine, d’éteindre la télévision et passer une soirée autour d’un plateau de jeu. En famille, entre amis ou avec son club de jeu. Les week-ends jeux font désormais concurrence aux heures passées devant les séries TV. Quel plaisir de s’amuser avec des gens que l’on apprécie. Et pour de vrai ! Sans ordinateur, sans tablette, sans smartphone. Face à face ! À discuter, à réfléchir ensemble et à rigoler.

Le rappel à l’ordre du numérique

Succès faisant, le secteur ludique a ainsi connu un véritable « boom ». Une incroyable explosion. Plusieurs milliers de nouveaux titres sont ainsi proposés chaque année. Les éditeurs revisitent les grands classiques, mélangent les mécanismes de jeu ou s’adonnent à l’invocation. Et justement, pour certains, cette innovation passe par l’apport et l’utilisation des nouvelles technologies. Plus radicalement, quand on vous parle de nouvelle technologie, comprenez bien que le message est « hey les gens, bougez pas on va vous flanquer un petit écran numérique dans tout ce bazar ! » Non mais, qu’on se comprenne bien. Qu’il n’y ait pas de malentendu.

Et en matière de jeux de société, la tendance actuelle est d’utiliser généralement un smartphone ou une tablette avec votre matériel de jeu. Une petite application et le tour est joué ! Mais pour ne pas vous faire trop peur, on le nomme un « compagnon ». Mais si vous savez, le gars sympa, qui est là pour vous simplifier la vie, pour vous apporter un fond sonore ou encore gérer la sauvegarde. Pour apporter aussi une immersion ou de l’interaction ! Parce que c’est vrai, en tant qu’humain vous n’êtes pas très doués pour l’interaction ! Heureusement que « tonton numérique » vient à votre rescousse.

De nombreux jeux proposent désormais de s’adjoindre les services d’une application dédiée. Parce que c’est fun ! Parce que c’est utile ! Et il faut bien le reconnaître, généralement, le compagnon numérique est plutôt bien réalisé et même très pratique. Alors bien sûr, vous pouvez ne pas l’utiliser. Vous pouvez effectuer les bruitages à la bouche, sauvegarder votre partie avec un bon vieux crayon et un bloc de papier ou même encore réfléchir par vous même. Dans certains jeux, l’application comporte même le moteur du jeu et il n’est pas possible de s’en passer. Concrètement, vous effectuez vos actions sur le plateau de jeu ainsi qu’avec le matériel physique à votre disposition, puis vous laissez l’application interagir en fonction des choix effectués. Ou inversement. Votre partie est directement liée à ce qui se passe sur l’écran. Ou sur les écrans ! Sans cette application, impossible de jouer au jeu.

Et dans dix ans ?

La question reste à l’heure actuelle centrale et relativement ouverte. Par définition, les jeux de société ont été jusqu’à présent intemporels. Même si ce n’est pas des plus passionnant, vous pouvez toujours jouer aux jeux que vous pratiquiez il y a trente ans ou plus. Mais alors qu’en sera-t’il des jeux actuels dont on ne peut pas se passer du numérique ? La technologie avance à pas de géants et à une vitesse folle. Les applications smartphone d’il y a cinq ans sont souvent obsolètes laujourd’hui. Surtout si son concepteur n’y a pas apporté de mise à niveau. Dès lors, qu’en sera-t’il des « App j2s » dans quelques années ?

Avec toute la meilleure volonté du monde, on est en droit de se demander si dans cinq ans ou dix ans, l’éditeur aura toujours mis à jour son application. Google ou Apple n’hésite pas à rendre inopérantes les applications qui n’ont plus été adaptées à leurs nouveaux systèmes d’exploitation. Dès lors, pour une centaine de joueurs qui utiliseront encore le jeu précédemment développé, est-ce qu’il sera toujours sensé de maintenir une application à jour ? L’éditeur devra disposer des ressources humaines et financières pour maintenir à flot ces « moteurs de jeux ». Sans mauvais jeux de mots, le jeu en vaudra-t’il toujours la chandelle ?

Si les poids lourds du secteur ludique ne font pas trop débat sur leur département « digital & numérique », qu’en sera-t’il alors des petits éditeurs ? Ceux qui lancent leur premier jeu avec moteur numérique et le font par exemple via un financement participatif ? Ils demandent aux contributeurs de les soutenir pour financer leur projet mais en échange nous ne connaissons pas quel sera leur potentiel pour maintenir à jour les applications faisant fonctionner le cœur de nos jeux.

On voit déjà certains nous rétorquer que dans quelques temps, nous aurons de toute manière passés à un autre jeu. A une autre expérience ludique. Oui, peut-être. Ou alors on y jouera toujours à ce bon vieux jeu qui nous passionne. On a peut-être à cœur de le ressortir avec notre rejeton ou juste pour le plaisir. L’avenir nous apportera des éléments de réponse mais il faudra peut-être accepter que certaines boîtes de jeu ainsi que leur contenu seront tout simplement bons à envoyer au rebut.

Connectés, déconnectés et finalement re-connectés

La réalité nous rattrape toujours. Aujourd’hui, notre réalité est bel et bien un quotidien dans lequel le numérique occupe une place centrale. On pensait grâce aux jeux de société, se déconnecter des écrans et s’en passer. Mais finalement, la technologie nouvelle nous simplifie tellement les choses. Et le domaine du jeu ne semble pas y échapper. Certains apprécient ce mélange entre réel et virtuel. D’autres s’insurgent et crient au scandale.

(un exemple de jeu avec App mobile)

Avec l’apport du numérique dans les jeux de plateau, on est finalement en droit de se demander où se trouve la frontière entre jeu de société et jeu vidéo. Surtout pour les opus qui obligent à utiliser une application pour y jouer. Finalement, puisque le cœur du jeu est numérique ne serait-on pas en présence d’un jeu vidéo que l’on aurait accessoirisé d’un matériel physique ?

Avec ce petit sujet, nous souhaitions simplement poser la réflexion. Le but n’est pas de pointer du doigt l’apport du virtuel dans le jeu de société. Peut-être que dans quelques années, chaque jeu sera doté de son pendant numérique. De son « compagnon ». Demandons-nous simplement si c’est ce que nous souhaitons vraiment. Est-ce que le jeu de société doit rester exempt de nouvelle technologie ? Ou à contrario est-ce qu’il y a matière à développer et systématiser ce mélange ? Ou peut-être un mix serait la solution ?

Alors finalement, le fait de vouloir se déconnecter de la télévision, de l’ordinateur ou de son smartphone était très louable. Mais visiblement nous sommes devenus accrocs. Incapables de s’en passer ? Quoi qu’il en soit n’oublions pas que nos habitudes de consommation orientent forcément le développement. Si on cautionne le numérique en achetant des jeux avec application, le marché ira forcément dans notre sens. Mais si on préfère faire sans, ne pas dépenser son budget ludique dans de tels jeux, c’est le message inverse qui sera envoyé. Il y a juste une question à se poser: En tant que joueur, que souhaitons-nous ?

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Rédacteur de l’article : Léo

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