Je m’en souviens comme si c’était hier… Lors de la phase d’approche, les radars du vaisseaux étaient restés silencieux. Pas d’écho, aucun bâtiment hostile sur l’ensemble du cadran et même aucune transmission en provenance de la surface. La zone toute entière semblait déserte. Le commandant de bord a ordonné une mesure de décélération et nous avons mis le cap plein ouest en direction de cette nouvelle planète, fraîchement découverte. Nous progressions avec prudence car à plus de dix-sept années lumières de notre port d’attache, toute erreur se paie chère. Plus nous pénétrions dans l’atmosphère et plus la densité se faisait ressentir. On en était même à se demander si la vie pouvait y survivre. Et dans un lourd grondement, le vaisseau s’est finalement posé. Les moteurs se sont éteints et presque immédiatement, l’équipe technique a lancé un scan des éléments extérieurs environnants. Les résultats étaient plutôt impressionnants. Des ressources à profusion ! Mais aucune matière connue. Des gaz, des roches, des végétaux, une planète entière à découvrir ! C’était ainsi acté, nous venions de découvrir un site exceptionnel et l’extraction pourrait à présent débuter.
Amis aventuriers, on se retrouve une nouvelle fois en orbite, quelque part dans une galaxie inconnue et lointaine, pour un jeu qui fait la part belle à la science-fiction (SF). Et pour nous, joueurs francophones, il s’agit là d’une localisation qui nous est proposée par l’éditeur Matagot. Car oui, Alien Artifacts n’est autre qu’un gros jeu, principalement axé sur des cartes, et qui a été édité dans son édition originelle par les polonais de Portal Games. Un éditeur que l’on connaît bien dans le paysage ludique avec des opus à son catalogue comme « Imperial Settlers » ou « First Martians ».
Et une fois n’est pas coutume avec Portal, le jeu n’est pas signé Ignacy Trzewiczek ! Non, il s’agit du duo Marcin Senior Ropka et Viola Kijowska. Des noms plutôt méconnus pour nous en francophonie, mais qui signent là un opus assez poussé, clairement destiné à un public de gamers. Car oui, Alien Artifacts s’adresse à des joueurs de 14 ans, pour des parties d’environ 60 minutes (peut-être un peu plus) et pour 2 à 5 explorateurs de l’espace.
Alors on vous le disait précédemment, nous sommes totalement dans un thème SF. Là, il serait presque difficile de faire mieux, tellement la thématique va nous faire voyager dans un univers à des années lumières du nôtre. Imaginez-vous à la tête d’une faction d’interplanétaire, dont votre mission sera d’envoyer vos vaisseaux de recherche dans un espace inexploré pour accroître votre savoir et votre puissance. Plutôt surprenant, non ? Mais on ne s’arrête pas là. Basé sur un important deck de cartes, le jeu vous obligera à construire de puissants et performants vaisseaux, développer des technologies et découvrir des planètes inconnues pour les exploiter. Le titre est naturellement un opus compétitif où vous pourrez également combattre des aliens mais également les autres joueurs qui incarnent d’autres factions qui auront les mêmes velléités que les vôtres.
Alors sans plus attendre, on pousse les réacteurs au maximum et on fait un bon en hyper-espace vers les règles du jeu.
Dans ce vaisseau, Philippe manœuvre !
Alien Artifacts est un jeu dans lequel votre faction cherche à explorer de nouveaux mondes, découvrir de puissantes technologies et construire d’imposantes flottes afin de vaincre les forces aliens qui menacent votre existence. Grâce à ces actions, vous amassez des points de victoire afin d’espérer gagner la partie. Chaque joueur commence avec trois cartes de ressources et un plateau de faction. A gauche du plateau de faction vous déposerez vos cartes (vaisseaux, technologies et planètes) en construction. Et à droite, les cartes construites qui représenteront votre Empire.
A votre tour, vous effectuez deux phases, dans l’ordre. A savoir, durant la phase d’action, vous effectuez exactement une action. Puis, à la phase de pioche, vous pouvez défausser puis compléter votre main pour obtenir trois cartes de ressources. Votre tour se termine et le joueur suivant peut alors débuter le sien.
Intéressons-nous à présent à la phase d’actions et justement, aux actions possibles. Les actions possibles sont au nombre de dix. Sept actions de base et trois actions opérationnelles. A noter que vous pourrez aussi effectuer des actions de factions et d’autres qui sont encore présentes sur les cartes. Mais nous y reviendront.
Première action possible, celle consistant à acheter. Grâce aux crédits que vous disposez en banque, vous pouvez piocher des cartes de vaisseaux, de technologies ou de planètes pour les ajouter à votre zone « En construction ». L’achat vous coûte 5 crédits. Les effets mentionnés sur les cartes restent pour l’instant inactifs.
Deuxième action à votre disposition, découvrir une planète. En utilisant cinq symboles de ressources verts présents sur vos cartes en main, vous pouvez découvrir une planète de votre zone « En construction » pour la déplacer vers le côté « Empire » de votre plateau de faction. A noter que vous ne pouvez pas utiliser plus de deux cartes de ressources de votre main (limite d’assemblage). Lorsqu’une planète est découverte, vous devez décider de quel côté placer la carte (soit coloniser, soit exploiter). Un côté offre des bonus pour la partie alors que l’autre côté produit immédiatement trois cartes de ressources qui sont placées sous la carte de la planète découverte.
La troisième action consiste à développer une technologie. Cela utilise le même principe que celui de découvrir une planète. Vous dépensez cinq symboles de ressources bleus présents sur vos cartes en main puis vous choisissez le côté de la carte placée désormais dans votre zone « Empire ». Soit vous déployez la technologie soit vous effectuez une action de vente à la corporation. Un côté vous permet de bénéficier de la technologie alors que l’autre vous permet de scorer et obtenir des points de victoires supplémentaires en fin de partie.
La quatrième action vous permet de construire un vaisseau. On reprend le même principe qu’expliqué précédemment mais avec les ressources rouges présentes sur vos cartes en main. Lorsqu’un vaisseau est construit, soit vous le faites rejoindre la flotte, soit vous l’envoyez en mission. Un côté de la carte vous octroie un bonus pour la partie, alors que l’autre vous permet d’attaquer immédiatement un système alien ou un vaisseau d’un autre joueur. Faisons une petite parenthèse pour vous expliquer brièvement les attaques. Si vous décidez d’attaquer un autre joueur, celui-ci choisit son plan de défense puis vous piochez une carte de ressources dont la valeur au centre définit votre attaque de base. On ajoute à cette valeur les éventuels bonus de vos autres vaisseaux et on le compare à la valeur du plan de défense de l’adversaire ou du système alien. En cas de victoire, le gain est indiqué sur la carte du plan de défense (cela peut être par exemple un puissant artefact alien). Si un autre joueur est perdant, il pourra également être sanctionné avec des jetons de blocus qui viendront rendre indisponibles certaines actions.
La cinquième action du jeu vous permet de préparer des ressources afin de planifier de futures actions. Comme la limite d’assemblage n’est que de deux, vous pouvez choisir des vaisseaux, technologies ou planètes en construction et y poser en-dessous des cartes de ressources qui pourront être dépensées lors de prochaines actions. Sixième action, vendre des ressources. Cela consiste simplement à dépenser des cartes de ressources de sa main pour récupérer immédiatement des crédits en banque. Avec la septième action possible, vous pourrez retirer des jetons de blocus en dépensant des ressources de votre main.
Passons à présent aux actions opérationnelles qui sont au nombre de trois. La première consiste à lancer une offensive. Il s’agit d’une attaque qui suit les mêmes principes, sauf que cette attaque est de grande envergure et qu’elle utilise tous les vaisseaux opérationnels de votre zone « Empire ». La deuxième action vous permet de gagner du revenu. Avec toutes vos technologies opérationnelles de votre zone « Empire », vous pourrez gagner des points de victoire en piochant des cartes de ressources. Et finalement, la dernière action consiste à extraire du minerai des planètes ; chaque planète opérationnelle produisant une carte de ressource. A noter que ces trois actions ont un coût de cinq ressources, soit bleues, soit vertes, soit rouges.
La fin de la partie est déclenchée par le nombre de fois que vous avez vidé le paquet de ressources en fonction du nombre de joueurs autour de la table. Tous les points de victoire sont ainsi calculés et on désigne le grand gagnant.
Un 4X, SF avec des PV ! Vous avez compris ?
C’est décidément la grande mode des boîtes blanches au style épuré. Mais qu’à cela ne tienne, en l’espèce on trouve le résultat plutôt réussi et le boitage donne clairement envie de regarder ce qui se trouve à l’intérieur. Un opus qui réunit donc plus de 240 cartes toilées, des plateaux de faction avec vernis sélectif, différents tokens en carton, dix jetons en bois, des aides de jeu ainsi que le livret des règles. Au niveau du matériel on a beaucoup aimé les différents éléments de jeu qui comportent tous – sans exception – un toilage de protection. Même si les cartes sont passablement manipulées durant la partie, une fois n’est pas coutume, nul besoin de les protéger. La qualité est au rendez-vous ! Et impossible de faire également l’impasse sur le thermoformage qui est bien pensé, pratique et qui permet de ranger son matériel de jeu de façon ordonnée. Y compris la cartes sleevées ! L’intelligence alien semble être passée par là… C’est d’une efficacité redoutable.
On l’évoquait au paragraphe précédent, Alien Artifacts a été voulu dans un univers graphique des plus épuré. Et nous on a adoré ! La sobriété du matériel permet ainsi une très bonne lisibilité des éléments de jeux. Les illustrations travaillées viennent ponctuer les composants et le résultat nous a clairement donné envie. Le texte est écrit en grands caractères, de manière lisible, et les différents pictogrammes permettent facilement de se repérer dans le jeu. Un parti pris qui n’a donc pas manqué de nous séduire puis de nous convaincre définitivement.
La règle du jeu est un document de seize pages, très bien rédigé et illustré dont il faudra parfois relire certains passages lors de vos premières parties. En effet, si Alien Artifacts est un jeu à la mécanique simple, la prise en main demande de l’investissement. La règle en elle-même n’est pas complexe mais elle comporte de nombreux éléments et pas mal de subtilités. Avec dix actions de base pour le tour de jeux, des actions secondaires, des capacités spéciales sur de nombreuses cartes et des mécanismes prenant en compte la thématique 4X (exploration, extermination, expansion, exploitation), il y a de quoi être un peu perdu lors d’une première approche. Et donc, on ne saurait trop que vous déconseiller de sortir Alien Artifacts avec des joueurs débutants.
Prenez donc le temps de vous familiariser avec les éléments du jeu, les termes techniques et les mécanismes. N’hésitez pas à regarder également une explication ou une partie en vidéo. Cela aidera grandement !
La première partie sera donc inévitablement une partie de découverte. Après quelques tours, on saisit assez vite les mécanismes. Et en principe, une fois que le premier deck de la pioche est épuisé, on arrive généralement à échafauder les grandes lignes de sa stratégie. Puis forcément, tout devient clair. Car on le rappelle, une fois le jeu pris en main, il n’y a rien de complexe et Alien Artifacts dévoile toute sa fluidité et ses tours de jeu très dynamiques. Dynamiques dans les sens où cela va vite. Très vite même, car lors de votre tour de jeu vous effectuez une seule action, vous refaîtes votre main et c’est au suivant. Avec un temps d’attente réduit au minimum, autant dire qu’il y aura de la nervosité dans la galaxie !
L’opus est estampillé 4X mais il n’est pas à comparer avec un jeu de civilization ou par exemple un Scythe. On reste sur des cartes dont la thématique va orienter des actions d’exploration, d’exploitation, d’extermination ou d’expansion, mais d’une manière beaucoup plus légère. Et cela colle très bien avec la vivacité des tours de jeu.
Au niveau des mécanismes présents dans Alien Artifacts, nous sommes essentiellement sur de la gestion de main associée à du combot et de l’optimisation d’actions. Tout le cœur du jeu tourne autour de cela. Les technologies vont par exemple diminuer certains coûts de construction, les ressources vont permettre d’effectuer des achats et de nombreuses cartes vont se combiner entre-elles afin d’optimiser votre jeu. Et l’ensemble fonctionne merveilleusement bien. Le gameplay a été travaillé et cela se ressent fortement, pour notre plus grand plaisir. Vous devrez également faire preuve d’anticipation, tant au niveau de la préparation des constructions, que des crédits à utiliser ou des futures techlogies/vaisseaux/planètes à piocher.
Évoquons aussi la phase de combat qui fait légèrement appel au hasard, mais qui est vraiment plaisante à jouer. Parfois dans certains opus, cette phase peut être longue et complexe. Dans Alien Artifacts, ce n’est vraiment pas le cas. Les combats se résolvent rapidement et simplement, et le jeu n’est vraiment pas punitif. Au contraire, il récompense les prises de risques ce qui permet de faire évoluer son jeu et sa partie. On a beaucoup aimé !
En terme de sensations de jeu, l’opus est vraiment plaisant. On ne reste quasiment jamais oisif, et pour peu que vous y jouiez à deux, la partie n’aura presque aucune interruption. Entre combots, interactions durant les combats, belle profondeur de jeu, gestion, anticipation… il a véritablement de quoi se faire plaisir. En outre, le jeu s’installe rapidement et on peut très vite commencer à y jouer. Avec le dynamisme de son gameplay et la vivacité des tours de jeu, le temps passe vite, très vite ! Tantôt on découvre une planète et au tour suivant nous voilà déjà en train de combattre un autre joueur ou un alien tentaculaire ! La diversité des options et la façon avec laquelle le jeu permet de passer d’une action à l’autre est plutôt impressionnante. Un dernier mot encore sur la rejouabilité qui est bien au rendez-vous. Six factions différentes avec de petites capacités spéciales qui leurs sont propres, des technologies aux effets variés, de multiples choix à effectuer lors de la pose des cartes dans notre zone « Empire », etc. Il y a de quoi renouveller l’expérience ludique !
Au final, une jolie surprise et une belle découverte. La mention 4X peut laisser présager d’un opus long et complexe mais il n’en est rien ! Un bon mélange entre un gameplay rafraîchissant où le plaisir de jouer des cartes est bien présent, et une thématique qui nous propulse dans un univers SF. On ne regrette vraiment pas ce bond en hyper-espace qui nous aura fait jouer à un titre qu’on aura plaisir à ressortir régulièrement de notre ludothèque.
Notez encore qu’une version solo du jeu est proposée en français sur le site Board Game Geek (non incluse dans la boîte du jeu). Nous pourrons éventuellement y consacrer un article; laissez-nous vos commentaires si cela vous intéresse.
Discovery, première extension
Pour aller encore plus loin dans le jeu, Portal Games, l’éditeur originel d’Alien Artifacts, a annoncé une première extension baptisée « Discovery ». Le jeu évoluera ainsi vers un élargissement de son gameplay qui tournera autour d’une nouvelle ressource; les ressources alien.
Ainsi, c’est une petite boîte qui est proposée, uniquement composée de cartes, pour un prix d’ores et déjà annoncé de 14€. À l’intérieur, 18 cartes de ressources alien, 10 nouvelles planètes, 8 nouvelles technologies, 4 puissants artefacts, 10 nouveaux vaisseaux et la règle du jeu. Pour l’instant, Matagot n’a pas décidé s’ils localiseraient également cette extension en français.
Maintenant, à vous de vous forger votre propre avis.
La règle du jeu en français
Le contenu de la boîte du jeu en vidéo dans la Zone Jeu de Société
Plein de bonnes choses sur Alien Artifacts sous l’objectif de Martin Montreuil
Une version solo pour Alien Artifacts (par Arcanumtl, et francisé par Thibaut de SessionSolo)
Le site de l’éditeur Matagot