En position de combat, les regards fixés sur l’ennemi, les deux armées se font face. Les soldats sont prêts à bondir tandis que les défenseurs affûtent leurs épées. Dans ces contrées vallonnées, les terrains sont escarpées et les affrontements vont être terribles. Aucune chance d’échapper au conflit, l’Empereur lui-même vieille sur la destinée de ses troupes. A la première heure du matin, les tambours de guerre résonnent. Ça y est, la bataille est à présent inéluctable…
Bataille il y aura ! Mais ce sera plutôt sur une table de jeu, avec le petit dernier de l’éditeur qui nous veut un bon karma, l’éditeur Oka Luda ! Après l’excellent Sansara, ils nous reviennent avec un jeu malin et stratégique qui répond au doux nom de « Kami ». Le titre est un jeu inspiré du Goïta Shogi, un jeu traditionnel japonais, connu depuis le milieu du 19ème siècle. C’est donc une édition revue et corrigée pour laquelle Oka Luda a confié à Pauline Berdal le soin de réaliser les différentes illustrations. Dans cette version réadaptée, Kami pourra ainsi être joué par deux ou quatre joueurs, dès huit ans, pour des parties d’environ vingt minutes.
Kami c’est avant tout un jeu composé uniquement de cartes, auxquelles l’éditeur a ajouté des pièces de monnaie en carton pour le comptage des points. Le principe du jeu est extrêmement simple. Avec huit cartes dans votre main, vous jouez une succession de batailles et vous essayerez d’être le premier joueur, ou la première équipe, à atteindre quinze points. Cependant, seule la dernière carte jouée vous permettra de marquer des points de victoire.
On vous explique tout cela de manière un peu plus détaillée et on vous dira ensuite ce qui nous a beaucoup plus dans cette version de Kami.
Au milieu du chaos se trouve aussi une opportunité
A quatre joueurs, deux équipes de deux s’affrontent. La première équipe qui totalise 15 points de victoire remporte la partie.
Chaque joueur reçoit 8 cartes. A son tour le premier joueur pose une carte de défense devant lui face cachée. Puis une carte d’attaque face visible. Son tour est alors terminé. Le joueur suivant – c’est-à-dire le joueur de l’équipe adverse – peut alors décider de suivre. Pour ce faire, il doit poser en défense, face visible devant lui, la même carte qui a été jouée en attaque par le joueur précédent. Et enchaîner avec une nouvelle carte en attaque, face visible. Mais il n’est pas obligé de suivre, il peut passer son tour parce qu’il ne veut pas ou ne peut pas jouer. Puis c’est au joueur suivant. Et on continue de la sorte jusqu’à ce qu’un joueur pose sa huitième et dernière carte. C’est cette seule et unique carte qui va marquer des points pour son équipe.
Concernant les cartes, précisons qu’il en existe de huit types différents. Chaque carte offre des points de victoire divers et les cartes sont disponibles entre deux et dix exemplaires différents dans le deck.
A la fin d’une manche, quand les points de victoire sont attribués à une équipe, les cartes sont à nouveau redistribuées et une nouvelle manche peut alors commencer. La première équipe à 15 points remporte la victoire.
A deux joueurs, la règle de base ne change pas. En revanche, au centre de la table, 8 cartes sont placées face cachée. Sur ces huit cartes face cachée, sont placées huit autres cartes face visible. A son tour, le joueur peut décider d’utiliser les cartes qu’il a en main ou celles placées au centre de la table. Quand, au centre de la table, une carte face cachée est découverte, cette dernière devient immédiatement visible.
Y’a Koi Dedans ?
La victoire n’est que le fruit d’une supputation exacte
Le concept du jeu nous a vraiment intrigués. Un jeu dans lequel seule la dernière carte permet de marquer des points ? Mais qu’est-ce que c’est que cette histoire ? Vite vite vite, on regarde ce qui se trouve à l’intérieur… Et là, force est de constater que c’est plutôt minimaliste. 32 cartes, quelques jetons, la règle et c’est tout ! Mais en fins connaisseurs, on se dit immédiatement que cela sent plutôt bon. En effet, les jeux venus d’Asie et plus particulièrement les concepts de jeux japonais, nous habituent régulièrement à du matériel très minimaliste mais avec une belle profondeur de jeu. Serait-ce le cas de Kami ? Nous verrons…
Un matériel donc sobre, mais joliment produit. De grandes cartes toilées au format tarot, des beaux jetons en carton pour les pièces et surtout, des illustrations incroyablement belles ! Chacun jugera mais nous, on est véritablement sous le charme. Des tons harmonieux et un sacré coup de crayon pour des illustrations qui nous plongent littéralement dans l’ambiance de l’Asie. Avec ces visuels forts et franchement réussis, Kami aura eu l’audace d’émerveiller nos yeux et nos parties de jeu ! Soldats, dragons, cavaliers, tours, samouraïs… wouaw, c’est superbe !
Côté règles, on se retrouve avec un feuillet recto-verso qui tient sur une seule page. Les explications sont claires, avec des illustrations pour bien comprendre les subtilités du jeu. Et il y a même des conseils stratégiques, sans oublier quelques petites variantes qui permettent de pimenter et diversifier légèrement les parties. On a apprécié ce document, bien structuré et qui nous a permis de comprendre facilement et simplement le jeu.
Pour la mise en place, il suffit de brasser et distribuer les cartes. Autant dire que la partie peut vite débuter. A deux joueurs, 16 cartes sont également placées au centre de la table. La prise en main du jeu ne pose pas de soucis. Cependant, lors de la première manche, on ne comprend pas vraiment ce qui se passe durant le jeu. On pose nos cartes de manière irréfléchie, mais quand vient la dernière, là tout devient plus clair. Lors de la deuxième manche, ça y est tout s’est mis en place et on saisit les subtilités du jeu. Et surtout, les aspects tactiques et toute la profondeur de jeu.
Au niveau du gameplay, on retrouve des mécanismes de pose; non pas de tuiles mais de cartes. Une pose de cartes directement liée à la gestion de votre main. En effet, le choix des cartes revêt une importance capitale dans Kami. Une erreur se paie cash et l’anticipation tout comme l’analyse du jeu doit être de chaque instant. Vous pourrez aussi essayer de bluffer vos adversaires mais ce n’est pas si simple et le jeu ne repose pas sur ce principe. Cela se ressent principalement à deux joueurs – à quatre aussi mais moins – mais Kami va également vous permettre de jolis combos. En effet, en analysant correctement le jeu, les différentes cartes déjà jouées et en pesant les risques, vous pourrez ainsi enchaîner vos poses de cartes. En bloquant l’adversaire, vous pourrez immédiatement rejouer dans une partie à deux. Ou à quatre, de bloquer le joueur suivant et ainsi offrir la possibilité à votre coéquipier d’enchaîner avec une nouvelle pose.
On ouvre rapidement une petite parenthèse sur le facteur chance qui est présent dans Kami. Il faut être clair, nous sommes dépendants du tirage des cartes. Moins à quatre qu’à deux joueurs, mais quand même. Dans des parties à deux, il nous est même arrivé de ne pouvoir poser que les deux premières cartes et de devoir regarder notre adversaire poser ses huit cartes. Sans rien pouvoir faire. Cela est assez frustrant et même un peu énervant sur le coup. Mais le jeu est ainsi et si le tirage est mal fait, on ne peut que subir la partie. C’est ainsi. On vous rassure tout de même, cette situation ne nous est pas arrivée souvent.
En termes de rejouabilité, Kami propose des parties suffisamment bien renouvelées. Avec cette part d’aléatoire dans la distribution des cartes, on ne se retrouve pas vraiment avec des parties ou des manches similaires. A tout le moins, on peut retrouver certains combos qui se répètent d’une manche à l’autre, mais l’art est aussi d’apprendre à les maîtriser et à les utiliser à bon escient.
C’est donc une magnifique découverte que cette adaptation ludique proposée par Oka Luda. Même un petit coup de cœur du moment. Quand la simplicité et l’efficacité fonctionnent de concert, on ne peut que s’en ravir. On a aussi beaucoup aimé les sensations de jeu qui sont bien différentes lorsqu’on joue à deux ou à quatre joueurs. Dans une configuration à deux, le fait d’utiliser les cartes au centre de la table, vont vous permettre de compléter votre main et d’enchaîner efficacement certains combos. Ou marquer davantage de points. Tout comme il sera possible, à contrario, de sacrifier des cartes pour retirer des possibilités de marquer des points chez l’adversaire. A quatre, le jeu est nettement plus interactif. Avec de nombreux échanges et regards croisés avec son partenaire. Il y a beaucoup plus de blocages de l’adversaire et on essaie de favoriser son coéquipier. Il faut également prendre en compte toutes les cartes jouées, alors qu’à deux, huit des trente-deux cartes peuvent rester cachées. C’est donc deux manières bien différentes d’aborder le jeu mais deux manières qui ont toutes deux leur charme et leur intérêt.
Avec seulement trente-deux cartes, une règle simple et une belle accessibilité, Kami taquine le haut du baromètre. Son côté nomade est un vrai plus ; il est tellement simple de le glisser dans une poche ou dans un sac à dos pour des heures et des heures de jeu entre amis. Oka Luda nous veut toujours un bon karma, et avec Kami, ils passent véritablement de la théorie à la pratique ! Kami restera ainsi définitivement pour nous un indispensable et une belle surprise de cette année 2019 ! A essayer absolument si vous en avez l’occasion…
Maintenant, à vous de vous forger votre propre avis.
La règle du jeu en français
La fiche de Kami sur Board Game Geek
Le site de l’éditeur Oka Luda